Devenue de plus en plus sale, la capitale burundaise, Bujumbura, perd progressivement sa robe de jolibilité. C’est ainsi que le Président Ndayishimiye a initié des travaux en coumbite pour remettre la capitale Bujumbura dans sa propreté. Lors du lancement de la semaine dédiée à la propreté dans la zone de Musaga il y a quelques semaines, le président Evariste Ndayishimiye a annoncé que trois navires transportant du carburant affrétés par le Burundi étaient en route pour résorber cette crise criante qui n’a fait que trop durer. Deux semaines après, les protagonistes se posent plusieurs questions sur ce qui s’est passé après cette annonce du Chef de l’État, car aucun bateau transportant du carburant n’a jamais accosté au Burundi et que le manque criant du carburant se pose dans le pays.
Différents services techniques approchés dont la SOPEBU, la Société pétrolières du Burundi, n’ont pas encore voulu donner des explications : Comme une patate chaude, certains chargés de la communication interrogés préfèrent référer les curieux dont les journalistes à leurs collègues, un cercle vicieux, nous ont rapporté nos confrères burundais.
Mais entretemps, la pénurie du carburant persiste au Burundi. Même si c’est interdit de faire la queue devant les stations-service, dépassés et n’en pouvant plus, des automobilistes bravent cette mesure et de longues files d’attente s’observent devant ces stations d’essence bien barricadées par une double rangées de fils barbelés.
Couverts de poussière, témoins des journées et des nuits passées à attendre l’or noir, les véhicules sont méconnaissables et défigurés surtout qu’ils se retrouvent sans plaques d’immatriculation. Les policiers les arrachent systématiquement comme une sanction infligée à tout automobiliste qui fait la queue devant une station-service alors que cette dernière est à sec.
Selon certaines confidences, certains chauffeurs récupèrent eux-mêmes leurs plaques d’immatriculation ’’pour ne pas tomber en de mauvaises mains’’, car pour les récupérer, il y a une amende à payer.
En attendant le carburant, se déplacer devient un casse-tête pour les burundais, c’est la débrouillardise à la limite du sauve-qui-peut. Il y en a qui s’approvisionnent chez le ’’grand voisin’’ de l’ouest du Burundi, l’addition est corsée et cela fait grimper les prix des déplacements et comme une réaction en chaîne, des conséquences se répercutent sur tout.
Dans ce contexte de pénurie chronique du carburant, le président Evariste Ndayishimiye avait annoncé que trois navires transportant du carburant acheté par le Burundi étaient en route. C’était le 12 août dernier, lors du lancement de la semaine dédiée à la propreté dans la zone de Musaga. Mais, jusqu’à présent, aucun navire transportant ce carburant n’a été perceptible et la crise persiste. Plusieurs réactions fusent de partout pour critiquer cette annonce du Chef de l’Etat.
« Aujourd’hui, je pense qu’il va y avoir les premiers déchargements du carburant que nous avons acheté depuis les raffineries. Et je suis sûr qu’il y a trois autres bateaux qui sont en route », avait rassuré Evariste Ndayishimiye, le Président burundais.
Il avait en plus rassuré que le pays aurait débloqué 30 millions de dollars par mois mais que le carburant acheté ne dépasserait pas 20 millions de dollars. « Le reste est détourné par les commissionnaires », a-t-il lancé, avant de préciser que ces derniers sont parmi les saboteurs dans ce secteur, sans révéler leur identité.
Entre-temps, dans la foulée, plusieurs observateurs et citoyens burundais se posent multiples questions sur ce carburant tant vanté et promis par le président de la République. D’après Agathon Rwasa, la pénurie de carburant est devenue une sorte de mythe. « On alimente l’opinion des promesses qui ne peuvent pas être tenues. Tenez, si on ne peut pas importer d’un coup 100 camions de carburant, comment est-ce qu’on peut porter 3 tankers ? Où trouve-t-on les devises ? ». Pour cet homme politique burundais, le problème n’est pas ailleurs si ce n’est qu’un problème de devises, puisque si on avait les devises, il n’y aurait pas de problème de carburant parce que les raffineries n’ont jamais fermé. « Tout autour de nous : au Rwanda, au Congo et en Tanzanie, il n’y a pas de problème de carburant », poursuit-il.
Concernant les fonds qui se volatilisent, Agathon Rwasa estime qu’il y a une mafia qui gangrène tout. « Je suis sûr et certain que le système au pouvoir sait tout. Malheureusement, la situation reste inchangée ».
Ce député à l’Assemblée nationale du Burundi souligne que tous les mécanismes pour juguler ce « fléau » sont là. « Mais qui peut redresser la situation ? Je crois que c’est une autre problématique autant faire semblant de ne rien entendre, de ne rien voir ».
Pour Tatien Sibomana : « Les propos du chef de l’Etat sont presque des lois ». Selon cet acteur politique, il faut que chaque sortie médiatique du chef de l’Etat soit une sortie bien réfléchie, bien analysée afin qu’il se rassure que tous les contours en termes de conséquences positives ou négatives aient été sérieusement analysés pour que cela ne crée pas de désespoir du côté de ses dirigés. « Le président de la République est le père de toute une nation. S’il promet des choses à son peuple et qu’il ne les réalise pas, il déçoit son peuple et vous comprenez la désillusion de tout un peuple envers son dirigeant. Cela devient très grave. Ils ne vont pas le cueillir dans la rue, ils ne vont pas le taper avec des bâtons, mais quand un peuple est déçu, les façons de réagir sont nombreuses. Il y en a qui sont immédiates, il y en a qui sont plus ou moins à brève échéance, il y en a qui sont à longue échéance, il y a des réactions d’une façon ou d’une autre. »
De sa part, Gaspard Kobako a déclaré en ces termes : « On croyait que la galère n’allait plus se reproduire avec cette promesse du Chef de l’État, mais… ». Le président du parti Alliance nationale pour la Démocratie, AND-Intadohoka indique qu’avec la promesse du chef de l’Etat, tout le monde a eu de l’espoir. « On croyait que la galère n’allait plus se reproduire. Tout le monde pensait que ça sera la fin du stress, des marches éreintantes ».
Pourtant, se désole le Gaspard Kobako, l’espoir risque de disparaître. « À peu près plus de deux semaines et bientôt trois semaines, nous attendons que le carburant nous arrive en accostant au port de Bujumbura ». Gaspard Kobako donne quelques précisions sur le temps qui s’écoule afin que le carburant arrive à Bujumbura. « À notre connaissance, il faut presque deux jours pour que les marchandises quittent le port de Kigoma pour arriver à Bujumbura. Même si ces bateaux étaient en haute mer, donc dans l’Océan Indien, il y a lieu de croire qu’en 17 jours, ces bateaux seraient au moins déjà arrivés à Dar es Salaam », a-t-il ajouté.
Cette situation risque, estime le président de l’AND, de générer une perte de confiance dans le leadership actuel du pays. « Les populations risquent de perdre davantage confiance, d’ailleurs ils l’ont déjà perdu à cause de nombreuses raisons évoquées par les dirigeants, y compris au sommet de l’Etat ».
André Nikwigize : « Le langage politique populiste qu’un leader emprunte permet de faire oublier certaines lacunes »
« De telles déclarations politiques interviennent lorsqu’il y a des crises dans un pays sur lesquelles un leader n’a plus de contrôle. N’ayant rien à offrir pour résoudre ces crises, il essaie de prouver que l’origine des problèmes, ce sont les autres ». Selon cet économiste, le langage politique populiste qu’un leader emprunte permet de faire oublier ses propres lacunes. « Il crée des antagonismes entre « nous » (les bons) et « eux » (les mauvais). Le peuple, quant à lui, écoute, observe, et ne peut réagir, malgré qu’il connaisse la vérité. Alors, il se tait, en attendant des jours meilleurs ».
Le président d’OLUCOME, Gabriel Rufyiri, insiste toujours, quant à lui, sur cette différence qu’il y a entre le discours politique et le discours scientifique. « Souvent les messages du chef de l’Etat sont des messages politiques qui nécessitent des clarifications techniques. Je ne peux pas dire que le message du président de la République à Musaga qu’il est vrai ou faux. ». Gabriel Rufyiri fait savoir qu’il n’y a aucun navire qui part directement de Dar-es-Salaam jusqu’au Burundi. Il faut des wagons pour transporter le carburant jusqu’à Kigoma.
Selon les informations à notre disposition, les wagons-citernes ne sont plus utilisés en Tanzanie. Si c’est à Mpulungu, cela peut aller, mais à Dar-es-Salam, ce n’est pas possible. Les navires dont le président a parlé, c’est peut-être à Dar-es-Salam.
Le président de l’OLUCOME considère que les autorités devaient éclairer les burundais. « D’abord, quand est-ce que ce carburant a été commandé ? Par qui ? C’est combien de litres ? Il y a beaucoup de questions qui n’ont pas de réponses jusqu’à maintenant. C’est une information que les burundais ont actuellement besoin, mais on n’a pas de détails », regrette-t-il.
Du côté gouvernemental ou de la présidence du Burundi, c’est un silence radio malgré toutes ces voix discordantes. Le Burundi continue à traverser une grave pénurie de carburant et des coupures d’électricité fréquentes. Cette crise touche tous les aspects de la vie quotidienne, mais elle a des répercussions particulièrement lourdes sur le secteur de la santé.
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