lundi 31 mars 2025 Fizi 13:38:54


L’Île de Nauru vend sa nationalité pour payer la protection de ses habitants


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samedi 1 mars 2025  

Par Joseph Apolo Msambya

L’île de Nauru est un État insulaire océanien de faible altitude, situé en Micronésie, d’une superficie totale de 21 kmet d’une population de près de 13 000 habitants. Ce petit pays se trouve sous menace de la montée des eaux qui commence à ronger son littoral, raison pour laquelle il monnaye sa nationalité à hauteur de 105 000 dollars américains pour financer le déménagement futur de sa population du littoral vers le centre. L’Île de Nauru s’en tient à la force de son passeport doré, capable de permettre à son détenteur l’entrée sans visa dans plusieurs pays du monde. 

Les experts du climat de l’ONU estiment que l’île, et quatre autres États dont les Maldives, les Tuvalu, les îles Marshall et Kiribati risquent de devenir inhabitables d’ici 2100, provoquant 600 000 réfugiés climatiques.

Les financements climatiques étaient « insuffisants » pour répondre au défi qui s’annonce, assure Edward Clark, à la tête de ce Projet de déménagement des populations, considéré comme un programme de citoyenneté pour la résilience économique et climatique lancé en novembre 2024. Les premières demandes sont en cours d’examen, précise-t-il. Avec cette initiative, le gouvernement de Nauru envisage de mobiliser 5,7 millions de dollars dès la première année, selon Edward Clark. Les autorités espèrent que ce chiffre passera progressivement à 43 millions de dollars, une somme qui représenterait 20 % des recettes totales annuelles du gouvernement.

Nauru estime aujourd’hui que 90 % de la population devra un jour être déplacée vers des terres en altitude, actuellement inhospitalières et nécessitant donc d’importants aménagements. Une opération extrêmement coûteuse : la première phase de ce déménagement massif est estimée à plus de 60 millions de dollars. Pour payer l’addition, Nauru veut croire en son nouveau programme, vantant les mérites de son passeport qui permet d’entrer sans visa dans près de 90 pays, dont le Royaume-Uni, l’Irlande ou encore les Émirats arabes unis.

Plusieurs autres États du Pacifique ont déjà mis à la vente un système de passeport doré similaire, comme le Vanuatu, les îles Samoa ou le royaume de Tonga, recense le Lowy Institute, un groupe de recherche australien.

Mais ce système est controversé, car il peut faciliter des activités criminelles, met en garde Henrietta McNeill, experte à l’université nationale australienne. Certains pourraient, selon elle, se servir de leur nouvelle nationalité pour fuir la justice dans leur pays d’origine, blanchir de l’argent ou profiter des exemptions de visa octroyées par cette pièce d’identité. Une précédente tentative de vente des passeports par Nauru avait déjà mal tourné. En 2003, sa citoyenneté avait été ainsi octroyée à des membres d’Al-Qaïda, plus tard arrêtés en Asie, selon la chaîne australienne ABC.

Mais Edward Clark rassure que cette fois, Nauru n’accordera des passeports qu’à des investisseurs dont les antécédents auront été passés au crible. « Ce programme ne se limite pas à l’acquisition d’un nouveau passeport », a-t-il assuré, arguant qu’« il s’agit aussi de rejoindre une communauté qui se cherche des solutions novatrices pour relever les défis mondiaux ».

Depuis 2012, Nauru avait accepté des millions de dollars du gouvernement australien pour héberger des migrants ayant demandé l’asile en Australie. Mais le programme avait été progressivement réduit à la suite de 14 décès de détenus, de multiples tentatives de suicide et d’au moins six saisines de la Cour pénale internationale. Nauru détenait encore 87 personnes au 31 août 2024, selon les derniers chiffres du gouvernement australien.